Magaly Richard-Serrano, réalisatrice : “Si on engage une femme, on lui colle un mec pour la paterner”

Actrices, producteurs, réalisatrices… A l'occasion d'un dossier sur le sexisme ordinaire à Hollywood et dans l'audiovisuel français, publié cette semaine dans le magazine, Télérama.fr donne la parole à celles et ceux qui s'y confrontent chaque jour. Ex-championne de boxe, scénariste et réalisatrice, Magaly Richard-Serrano a notamment participé à la création de “Plus belle la Vie”et prépare son nouveau long métrage, “Stan”, prochainement en salles. Pour elle, les hommes ont une certaine conception de la féminité difficile à dépasser.

Par Propos recueillis par Isabelle Poitte

Publié le 25 février 2016 à 11h30

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 02h29

«A mes débuts, j'ai voulu gommer mon aspect “femme” ; Une façon de me dire : “C'est le talent qui parle et pas autre chose”. Mon premier long métrage, Dans les cordes, racontait une histoire de garçons. Ma productrice m'a demandé : “ Pourquoi des garçons ? Tu as été boxeuse, ta mère l'est aussi…” Ça m'a ouvert les yeux… Je me suis rendu compte que les femmes étaient encore des personnages de second plan, que tout était encore à explorer, et cela m'a donné envie de creuser des destins de femmes. Mon dernier film [Stan, NDRL] raconte l'histoire d'une fille rappeuse noire, qui ne rentre pas forcément dans les critères de la féminité. Elle est entourée de quatre garçons, et c'est une comédie romantique…

“La violence chez les femmes passe mal.”

Récemment, j'ai proposé à une chaîne de télé un projet de fiction d'anticipation sur le féminisme qui a, d'abord, été très bien reçu, au plus haut niveau. Puis on m'a expliqué que le projet présentait une vision trop radicale de la féminité… Le projet était depuis huit mois sur le bureau des décideurs, la qualité dramaturgique était bien là. Je pense que la façon dont je présentais ces femmes étaient un peu trop virulentes pour ces messieurs. La violence chez les femmes passe mal…

Bizarrement, au début, les choses me semblaient moins compliquées : il y avait peu de femmes réalisatrices, les chaînes et les producteurs en cherchaient. Aujourd'hui, on nous trouve un peu trop nombreuses ! Et les gros projets, les séries de 12 épisodes de 52 minutes, qui les fait ? Les hommes ! Si on engage une femme, on lui colle un mec pour la “paterner” un peu, au cas où elle serait débordée… Le paternalisme est rarement direct, mais dans les choix, au final. Je l'ai senti avec certains producteurs. J'en ai quand même entendu un me dire en pleine réunion de travail : “Arrête, on dirait ma femme !” Dans ces cas-là, Il faut le recadrer immédiatement quitte à paraître un peu virulente…

Je pense à la parité quand je constitue une équipe. Un tournage mixte est souvent plus fluide. Et ça me fait toujours plaisir de voir des filles dans les équipes machinerie et électro, dans les équipes caméras… »

 

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