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Marionnettes : des conditions de production précaires à l’épreuve des invisibles
Source : THEMAA - Association nationale des Théâtres de marionnette et arts associés
Selon une enquête réalisée par THEMAA (Association nationale des Théâtres de marionnette et arts associés) auprès de 80 compagnies et portant sur 135 spectacles créés ou repris entre 2019 et 2022, les compagnies de marionnettes supportent des conditions de production marquées par la précarité, la fragmentation des financements et l’importance des ressources “invisibles”.
Une création essentiellement nouvelle, souvent inaboutie
96 % des spectacles observés sont des créations originales (contre 4 % de reprises), révélant un faible recours au répertoire existant.
Pas moins de 19 % des projets échouent avant d’aboutir, illustrant les difficultés rencontrées dès la phase de production.
La durée de gestation est longue : 45 % des créations nécessitent 2 ans entre l’idée et la première scène ; seuls 17 % se réalisent en moins d’un an.
Le poids des contributions non monétaires
Un constat clé de l’étude : les ressources invisibles sont omniprésentes :
96 % des spectacles s'appuient sur temps de travail non rémunéré (répétitions, écriture, recherche).
83 % bénéficient de prêts ou dons matériels non budgétisés, principalement sous forme de mises à disposition de lieux en résidence (61 %) .
Ces résidences prennent des formes variées : mises à disposition sèche, défraiements ou hébergement à domicile, souvent sans accompagnement professionnel.
Du côté du travail scénographique, près de 42 % des contributions invisibles relèvent de l’écriture et de la recherche.
Fragilité économique et recours à l’autoproduction
40 % des spectacles sont autoproduits sans partenaires extérieurs, 50 % sans préachat, et 27 % sans coproducteurs ni préachats .
Les sources de financement sont fragmentées :
32 % via appel à projets publics,
22 % conditionnés à des actions culturelles,
11 % issus de commandes.
Les apports des coproducteurs couvrent en moyenne un tiers du budget, mais les montants sont en baisse pour l’ensemble du secteur.
Territoires, publics et modèles budgétaires
Les spectacles adultes sont mieux financés, avec 44 % de budgets issus de coproductions (contre 20 % en moyenne).
Les productions jeunesse comptent davantage sur l’autoproduction (24 %).
Les compagnies rurales investi moins : budget moyen de 38 600 € contre 66 800 € pour celles basées en zone urbaine .
L’autofinancement y atteint 31 % (contre 17 %), tandis que la coproduction ne dépasse pas 20 % en zone rurale (versus 34 % en zone urbaine).
Rentabilité délicate
Plus de la moitié des spectacles ne sont pas amortis, et 60 % ne dégagent aucune marge .
Le prix de cession moyen s’élève à 1 800 €, pour un coût de plateau moyen de 1 400 €, générant une marge brute médiane de seulement 400 € .
La rentabilité se fait plus fréquente dans les spectacles jeunesse (46 %) que dans les spectacles adultes (32 %) ou toutes catégories confondues (39 %).
Vers une marionnette durable ?
Cette étude confirme l’existence d’un modèle de production fragile et souvent invisible : travail non reconnu, contributions matérielles non comptabilisées, budget éclaté, précarité du développement. Pourtant, les compagnies affichent une vocation artistique forte : 28 % déclarent être prêtes à créer « coûte que coûte », valorisant le désir d’expression au-delà des contraintes financières.
Enjeux à relever
Reconnaître et valoriser les contributions invisibles dans les conventions et financements.
Considérer la solidarité territoriale (résidences, mutualisation) comme un vrai apport économique.
Renforcer les coproductions, soutiens publics et partenariats, en particulier en milieu rural.
Garantir des conditions économiques plus stables pour les marionnettistes, en accompagnant l’emploi et la structuration des compagnies.
En somme, l’univers de la marionnette se distingue par sa créativité et sa
capacité d’innovation, mais sa production repose sur un équilibre précaire et sous-estimé. L’étude de THEMAA éclaire la nécessité d’une meilleure prise en compte des ressources invisibles, d’un soutien renforcé de l’économie culturelle, et d’un accompagnement sur mesure pour que malgré leurs contraintes budgétaires, ces artistes portent leurs voix et projets auprès de tous les publics.